Points de vue des bronziers

Cette rubrique diffère des précédentes. Elle n’explique pas une phase du processus banko. Elle présente sous forme de lettres les impressions des bronziers . On y verra que le banko est un peu plus qu’une technique.


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Le bronze… le bronze et la technique africaine du banko, un voyage à travers le temps: retrouver et péréniser le geste de l’homme juste sorti du néolithique. L’utilisation conjointe de techniques issues de la poterie, du jeu des cueilleurs de miel et de la première création de l’alliage métallique, deux métaux mous pour un alliage dur! Idée incroyable de 4500 ans!
Un voyage à travers l’espace; comment ne pas penser à l’ombre du manguier, au chant de la théière sur le canoun*, aux rires de Mama et de Daouda lorsque la cire ramollit dans le creux de ma main à La Borne.


Laurent TERREYRE
La Borne

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C’est un souvenir impérissable que cette visite, quasiment fortuite, m’a laissée. Il s’agit bien sûr de la visite faite aux bronziers de Ouaga*. Depuis de parler de voir de toucher le banko m’enchante. Il doit y avoir un sortilège dans ce satané banko mais aucune envie de posséder le gris-gris guérisseur me parcourt. A mon avis je suis définitivement envôuté et c’est tant mieux.

GérardAUVRAY
La Borne

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J’ai fait la connaissance du Banko en Afrique. D’une consistance et d’une plasticité qui diffère de l’argile des potiers, là-bas, il est entouré du mystère que véhiculent les bronziers quant à sa préparation et à son contenu. Différent d’un atelier à l’autre, chacun y détient sa propre recette.
Bien que mes premières expériences aient été encourageantes, il m’a fallu un certain temps pour acquérir la maîtrise de son utilisation.
Le banko préparé à portée de main, c’est à la main de s’en servir de manière adéquate pour réaliser un moule. C’est elle qui entre en jeu, et le ballet des doigts s’anime autour du modèle en cire, pour l’enrober, épouser ses formes sans le déformer, de manière cohérente, rajoutant peu à peu de cette matière avec la juste pression, le bon lissage et la bonne retenue de la pièce. Cette opération consistant à obtenir un enveloppement du modèle solidaire et sans faiblesse se déroule le plus souvent en deux temps. En deux couches plus exactement, ce qui prend du temps, mais peut aussi en donner…
J’aime les moules au banko pour leurs formes à chaque fois différentes,
et ce contact sensitif avec la matière pour les réaliser. Les notions de moulage et de modelage y sont étroitement liées.
Le moule final tenant du modelage en son essence, c’est une sculpture éphémère chargée d’être le relais entre les matières qui transitent en elle.
Et comme le métal exige la rupture de cette dernière pour acquérir son indépendance, elle n’est, de ce fait, à même d’offrir ses formes généreuses et pleines, qu’à ceux qui auront eu la possibilité de la voir durant sa brève existence.
Moule au banko, porteur de bien des espoirs et de tous les possibles, à l’instar des divinités féminines, tu es un peu, aussi, symbole de fertilité.

Pierre JAGGI*
Neuilly en Sancerre

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La fonte du métal plus particulièrement la fonte d’objets artistiques est
l’un des métiers les plus vieux du monde.
C’est en effet depuis l’âge du bronze que l’homme a travaillé les métaux à des fins soit utilitaires, soit ornementales. Depuis lors, le développement de ces techniques et plus singulièrement de la fonte n’a point cessé.
Les générations de fondeurs se sont succédées en apportant à vrai dire peu de transformations majeures à l’art de la fonte, à celui de la cire perdue en particulier.

Dans son essence,cette fonte de la cire perdue est extrêmement simple: l’objet à reproduire en métal est soit modelé en cire pour des objets petits et pleins, soit façonné en cire autour d’un noyau en banko (argile) pour des pièces plus grandes et creuses.

En rentrant dans les détails du procédé de la cire perdue nous savons que les petits objets pleins sont entièrement façonnés en cire. Une fois que le modèle voulu est obtenu, on prépare deux types de banko pour le moulage.
Le premier type de banko se prépare comme suit:
-du banko bien sec, pilé et tamisé, du charbon de bois pilé et tamisé, du son de riz tamisé. Le tout mélangé à de la toile de jute ou du crottin de cheval en ajoutant un peu d’eau pour obtenir du banko pâteux.
Le deuxième type de banko se compose de banko sec, du son de riz, de toile de jute ou du crottin de cheval,de l’eau pour obtenir du banko pâteux.
C’est seulement la composition du banko du noyau qui diffère. Il est mixé avec de la paille, du son de riz et un peu d’eau.
Pour le moulage, on recouvre l’objet d’une fine couche du premier type de banko; une fois séché, on remet une deuxième couche plus épaisse du second type de banko et après ces deux couches de banko, on chauffe le moule et la cire fond. A la place de cette cire, on coule le bronze. Après la coulée du bronze, on laisse le métal se solidifier. On brise ensuite le moule pour obtenir l’objet et on passe à la finition.

Cette technique de la cire perdue avec le moulage en banko permet à chaque fois d’avoir un objet unique.

Abou TRAORE
Bobodiolasso
BUKINA FASSO

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Nous partons en Corse pour sept semaines chez Corinne, une amie céramiste qui souhaite apprendre le bronze méthode banko. Nous chargeons la 4L d’un creuset, de pinces, et de gros gants réfractaires. Sur place nous trouvons le crottin de cheval, la terre. Techniques, techniciens, nomades. Le soleil toujours présent en Corse nous aidera beaucoup pour le séchage des moules. Tout fonctionne bien, nous sortons les pièces de leur gangue avec quelques difficultés à cause d’une terre trop dure à la décoche.
Le moment du départ arrive, le retour se rapproche.
Nous partons et je m’imagine allant plus au Sud avec le matériel du bronzier refaire un apprentissage au hasard des rencontres.
Aller jusqu’à l’Afrique Noire pour retrouver le banko ancestral.

Annick DELHOMEL dite Adel
La Borne

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Par convention nous parlerons de banko, de terre ou d’argile pour définir le mélange de terre argileuse et de fibres végétales (charge) malaxé à la main ou foulé au pied et soigneusement pilé quand il sert à la confection de moules destinés à recevoir du métal en fusion.

Le bronze d’art à la cire perdue est avant tout une technique de reproduction liée à la sculpture. Il existe un autre aspect moins connu chez nous mais largement développé en Afrique: considérer le bronze à la cire perdue comme un moyen d’expression à part entière. Si la différence peut sembler mince elle est pourtant d’importance, notamment au niveau de la mise en œuvre;
Dans le premier cas, la sculpture est conçue pour être réalisée en bronze, ce qui n’est même pas toujours le cas. Un modèle en est réalisé, un moule à cire est préparé, qui va permettre de tirer en cire plusieurs exemplaires du modèle, chaque cire est enrobée d’un matériau réfractaire apte à recevoir le métal liquide. Le fondeur est ici celui qui va grâce à son savoir trouver les meilleurs solutions aux problèmes que pose le passage du modèle au bronze. Il est le plus proche collaborateur du sculpteur.
Dans le second, le sculpteur est le fondeur et conçoit directement l’objet en bronze, il ne passe pas par le stade du modèle, il crée une pièce unique. C’est ici que le travail de l’argile dans la conception du moule est sans doute le mieux adapté. L’artiste pense dès le départ son œuvre dans un rapport cire-argile-feu bronze. Le travail de la cire et celui de la terre sont intimement liés, si la pièce nécessite un noyau il est réalisé en premier, séché puis enrobé d’une couche de cire et il n’est pas rare que pour une pièce délicate la cire soit à chaque étape du montage consolidée par le banko.

En faisant cette différence entre le moyen de reproduction et le moyen d’expression on comprend mieux que cette technique de moulage, si elle permet toutes les fantaisies dans l’expression, n’est pas adaptée au travail de reproduction.. Un fondeur qui choisit la terre plutôt que le plâtre pour réaliser des moules d’une commande de x tirages d’une sculpture ne va pas pouvoir tirer les cires et ensuite penser à les mouler. Dès la conception même du moule à cire il doit penser banko. Il est indispensable que les éléments de cire soient adaptés au travail de la terre dont les principales caractéristiques sont la plasticité, contrairement à la coulabilité du plâtre, et un retrait au séchage qui peut entraîner une déformation du moule. Le fondeur optera donc pour le plâtre sauf dans des cas de figure particuliers. En revanche l’artiste qui veut vivre pleinement chaque stade de la création et en contrôler tous les aspects, s’il choisit le bronze comme moyen d’expression, utilisera avantageusement l’argile.

Patrice LAMOUILLE
Chanteloube

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1 préface 2 présentation 3 principe 4 la cire 5 le banko 6 prémoulage
7 moulage 8 décirage 9 outillage 10 la fusion 11 la décoche 12 finition
13 la patine 14 le noyau 15 sécurité 16 amélioration 17 points de vue 18 documentation
19 lexique 20 postface     vers le site la-borne.com