La cire dans toute sa majesté

Elle est vraiment majestueuse cette cire qui peut prendre une multitude de formes, de la bague finement ciselée à la sculpture monumentale. Nous devrions dire les cires car il y en a d’origine animale (cire d’abeille), végétale (cire de carnauba), minérale (cire de pétrole, paraffine). Dans le commerce plusieurs qualités sont proposées. Elles sont obtenues par différents mélanges et certains ajouts (huile, saindoux, colophane…). Nous nous limiterons ici à la cire d’abeille, qui est le matériau traditionnel. Son odeur de miel habille agréablement l’espace où on la travaille.
Elle est malléable à température ambiante (vers 25°C). Plus chaud elle devient molle pour être liquide vers 60°C. Refroidie elle se rigidifie de plus en plus pour finir dure et cassante vers la température de congélation (-18°C). C’est un hydrocarbure qui s’enflamme vers 160°C, pour shématiser c’est un genre d’essence stabilisée. Elle est une matière à part entière, et bien comprendre ses réactions est indispensable. On peut l’utiliser liquide, en boulette, en plaque, en
tige (colombin) ou en bloc. Comme on l’a vu elle réagit avec la chaleur et le manque de chaleur, l’eau lui est quasiment indifférente. Plus elle chauffe plus elle est poisseuse voir collante. On évitera ce problème en huilant légèrement mains
et instruments. L’outillage sera fonction de l’état où on la travaille.
Les différents états de la cire:

-Dure: l’hiver ou à la sortie du congélateur il n’est pas question de la modeler tel quel. On la travaille alors par abrasion, un peu comme du bois ou du métal. Se réchauffant au frottement des outils elle a tendance à les bourrer. On les nettoie avec un dissolvant (white spirit, pétrole lampant…). Il est envisageable de la poncer avec du papier abrasif en humectant ce dernier de dissolvant. Elle devient poisseuse? On la remet au froid. Pour éviter une attente fastidieuse, il faut travailler plusieurs pièces en même temps. Pendant que je travaille sur le lion, la gazelle et le crocodile sont à refroidir dans le congélateur. Les réflexions sur son travail font parfois du bronzier un émule du surréalisme.

-Molle: état dans lequel on la travaille généralement en Afrique. Les congélateurs y sont rares, aussi rares que le réseau électrique. Elle peut être assimilée à une pâte à modeler réagissant bien à la chaleur. Pour obtenir cette consistance, on peut diriger une ampoule électrique (spot à pince par exemple) sur la cire. On la rendra plus ou moins molle suivant la distance entre l’ampoule et la cire. Un plan de travail en bois, une table basse robuste, est l’établi idéal pour travailler la
cire. On huile la table, pour éviter les adhérences fâcheuses. Il est possible de la travailler à la boulette, ou encore, d’en faire des plaques à l’aide d’une petite
batte de bois, huilée avec modération. On tape sur la cire molle posée sur la
table, avec la batte. Attention, ça colle! On retourne la plaque, on tape. Et ainsi
de suite jusqu’à l’épaisseur désirée. Il est également possible d’en faire des tiges cylindriques ou coniques. Il suffit de rouler la cire sur la table et de contrôler la forme. Si on veut de très fins fils de cire, on peut utiliser une seringue hypodermique en plastique. Il faut bien saisir les réactions de la matière, sinon seringue et cire sont unies pour toujours. On commence par bien huiler la seringue. La cire est ramollie en la chauffant si nécessaire. On fait un cylindre de cire du diamètre de la seringue.Il est introduit par l’arrière du corps de la seringue. On ne tarde pas à mettre le piston et on appuie tout de suite dessus. Si la coordination est bonne, un fil de cire sort de la seringue. En appuyant sur le
piston on recule la main, le fil peut ainsi sortir aisément. Après quelques essais
des kilomètres de fil de cire peuvent sortir de la même seringue. En modifiant l’embout on peut changer forme et diamètre du fil de cire. Boules, boulettes, fils, spirales, petits cubes, lamelles, plaques, sont autant de pièces du mécano de la céroplastique. A vous de jouer.

-Liquide: cela veut dire qu’elle est chaude, attention ça brûle. On enduit certains objets en les trempant dans la cire liquide. Un cure-dents devient un bâtonnet ciré (rigide). Il peut être inclus dans une sculpture de cire pour rigidifier un bras trop
en surplomb qui ne tient pas en place. Certains vont même jusqu’à enduire des pommes de pin pour les transformer en bronze (pseudomorphose). Le fait d’enduire le bois facilitera sa combustion.
Il faut tout de même vérifier au moment de la coulée du bronze que le moule ne contient plus de déchets de bois, si ce n’est pas le cas on refait une cuisson du moule après avoir évacué le maximum de déchets.
La casserole dans laquelle chauffe la cire sera réservée à cet usage. On peut utiliser une rizeuse électrique (récipient chauffant et maintenant le riz à température) qui a l’avantage de ne pas surchauffer la cire. Quand la cire fume c’est qu’elle s’évapore. Elle se dégrade, ce qui est désagréable et dangereux,
elle peut s’enflammer. Bien vérifier que le feu est éteint sous la casserole de cire en quittant l’atelier. Plusieurs fonderies ont brûlées pour ne pas avoir vérifié ce détail. Puisque l’on trempe du bois, pourquoi ne pas tremper des tissus? Certains affectionnent les collants de femme, pas par fétichisme mais pour des raisons pratiques. Les drapés obtenus avec les collants peuvent éviter des heures de modelage. D’un effet facile, les drapés peuvent piéger le sculpteur dans une écriture systématique. Avec de la cire liquide on peut également remplir des moules afin de dupliquer des sculptures. Là on rentre dans un processus qui nous éloigne de l’Afrique traditionnelle.

Divers instruments peuvent aider à façonner une sculpture en cire (canif par exemple). Si l’on veut coller différents éléments en cire, il y a la possibilité de chauffer vivement la lame du canif et de la passer sur les parties à joindre des éléments, juste avant de les réunir. L’outillage du sculpteur-modeleur est
utilisable (spatules, ébauchoirs, mirettes…) ainsi que celui du dentiste.

Comme point de chauffe on peut utiliser un bec benzène, un brûlot à alcool ou un brasero. Une bougie est plus faible qu’un brûlot à alcool déjà peu performant. Un pistolet thermique peut aussi servir de source de chaleur. A noter, une chauffe superficielle de la cire rendra celle-ci brillante et tendue. Une chauffe quelque
peu supérieure la détruirera. Toujours utile de bien comprendre ses réactions. Comme source de refroidissement la bassine d’eau est à l’honneur en Afrique. Quand c’est possible un réfrigérateur va très bien.
Pour certaines pièces, il peut être utile d’armer la cire, on choisira du fil de
laiton, de cuivre ou de la brasure laitonnée. Ce sont des matériaux compatibles avec le bronze contrairement au fil d’acier.
La cire est utilisée comme modèle car on la travaille relativement facilement.
Elle fond à basse température et laisse peu ou pas de trace dans le moule après cuisson.
La cire a une densité de 0,96 (elle flotte) le bronze une d’environ 8,2. Il faut, de façon à simplifier, multiplier par dix le poids d’une sculpture en cire pour
connaitre son poids en bronze. Il est préférable de savoir ce que l’on va faire avec la cire. Un dessin préparatoire et un modelage en pâte à modeler ou en plastiline peuvent aider. Loin d’être complètes sur le sujet ces lignes se veulent être des balises dans un océan de cire.

Petit truc: certains effets se feront très facilement en utilisant un pic de porc-épic.

Remarque: Y a t’il d’autres matières qui comme la cire fondent à basse température (environ 100°C) et qui laissent peu ou pas de trace après cuisson?
La réponse est oui, ces matières sont récentes dans l’histoire de la fonderie. Ce sont certaines matières plastiques. On peut citer la mousse de polyuréthane, le polystyrène expansé (technique lost form), le PVC (bijouterie). Il faut faire attention aux vapeurs de ces produits qui sont parfois toxiques.

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1 préface 2 présentation 3 principe 4 la cire 5 le banko 6 prémoulage
7 moulage 8 décirage 9 outillage 10 la fusion 11 la décoche 12 finition
13 la patine 14 le noyau 15 sécurité 16 amélioration 17 points de vue 18 documentation
19 lexique 20 postface     vers le site la-borne.com